[Interview] Rencontre avec Patrick Van Bloeme, Co-président de Harris Interactive
- Kiss The Bride
- 18 décembre 2012
- 2.1k vues
- Environ 4 minutes de lecture
Pour commencer, pouvez-vous me parler de Harris Interactive et de son histoire ?
Le concept des NTIC (Nouvelles Technologies de l’Information et de la Communication) émergeait et Internet en était encore à ses balbutiements. L’ouverture du marché des télécoms représentait cependant une promesse de fort développement.
C’est en 2003 que la société américaine Harris Interactive nous a approchés. Ce très grand institut américain avait lui aussi fait des sondages en ligne une spécialité et il cherchait un partenaire pour s’implanter en France, et plus largement en Europe. Le rachat de Novatris a été signé en 2004, et Nathalie et moi l’avons accepté à la condition de pouvoir rester à la tête de l’entreprise et de conserver une grande liberté d’action. Ce rachat a été un succès et en 2007, nous avons définitivement scellé nos destins en abandonnant notre nom historique, Novatris, pour devenir Harris Interactive.
Comment expliquez-vous ce succès sur un marché pourtant compliqué ?
Je comprends que vous vivez chez Loyalty Expert cette même histoire, que vous êtes en train d’installer sur le marché des agences Marketing Services une vision très nouvelle du marketing. Pour preuve, vous n’avez visiblement pas de concurrent frontal qui propose des prestations aussi complètes et abouties que les vôtres.
Si je reviens aux raisons du développement rapide de Harris Interactive, je citerai également notre rigueur. Pour être reconnu comme un acteur légitime et respecté, il faut développer une expertise très pointue. C’est essentiel pour garantir la qualité de récolte et de traitement des millions de données que nous collectons au travers de la multitude d’études que nous menons en permanence.
Vous êtes justement confrontés comme nous au traitement et à l’analyse de millions de données chaque mois. Comment gérez-vous cela ?
Mais au-delà de la simple problématique technique, le vrai défi de nos métiers est bien de relier l’intelligence informatique à l’intelligence humaine. En effet, aujourd’hui, le sujet qui nous préoccupe, que ce soit en matière de sondages ou de marketing, n’est plus de recueillir des informations. Avec les nouvelles technologies, elles sont devenues plus accessibles. En revanche, la vraie réponse que nos clients attendent de nous est de faire parler ces données, d’en extraire de l’intelligence pour qu’elles deviennent de vrais outils de décision. C’est un sujet sur lequel nous concentrons beaucoup de nos efforts actuellement.
Quelle forme, justement, peut prendre l’intelligence de la donnée dans le monde des sondages ?
Je fais référence aux élections car nous avons vécu une expérience d’étude qualitative très intéressante. Pendant le débat télévisé de l’entre-deux-tours, nous avons constitué des « focus chats » par affinités au premier tour. L’enjeu était de capter les moments clés de la soirée où pouvaient s’opérer des basculements d’opinion, susceptible d’affecter leur choix de vote. Ainsi, les électeurs du FN ont clairement basculé du côté de Nicolas Sarkozy lorsque celui-ci a évoqué l’immigration. Un certain nombre d’électeurs se sont éloignés de Nicolas Sarkozy lorsque François Hollande lui a reproché son autosatisfaction. En revanche, si l’anaphore « Moi, président de la République » a fait le buzz dans les médias, il n’a pas eu d’impact positif pour François Hollande, voire même un début de rejet sur les électeurs très indécis. Au final, cette étude a montré très clairement qu’en se situant au cœur de l’évènement, on comprenait bien mieux l’opinion que lorsque l’on demandait a posteriori, même à chaud, de formuler des opinions sur cet événement.
Cet exemple montre à quel point il est important d’analyser en profondeur les leviers de décisions des individus, décrypter les ressorts de l’intérêt pour un discours, un produit, une marque… Nous avons encore nombre de méthodes à explorer, développer pour injecter encore plus d’intelligence dans nos analyses.
Une dernière question enfin. Vous vous êtes positionnés très tôt sur les sondages en ligne. Quelle est la prochaine révolution technologique à laquelle vous vous préparez ?
Nous sommes rentrés, nous et certains de nos confrères, dans cette prochaine révolution, et il s’agit évidemment du mobile. Aujourd’hui, nous accélérons notre présence sur les études mobiles dans le même état d’esprit que lorsque nous avons découvert le potentiel des sondages en ligne à la fin des années 1990 car nous pensons qu’il y a là un vrai bouleversement en termes d’usage qui va s’opérer. Compte-tenu du développement des smartphones dans les pays développés, nous allons très vite disposer de l’outil idéal de sondage, présent à tout moment dans la poche ou dans la main de nos sondés, en toutes circonstances !
Avec ce type d’outil, la frontière entre les études et la relation client va devenir ténue : nous commençons à travailler sur des dispositifs d’écoute active où le mobile deviendra un lien (d’étude) permanent entre des consommateurs et des marques ou des enseignes. Ce type de dispositif est une avancée pour les marques qui disposeront d’une bien meilleure connaissance de leurs clients. Mais également une avancée pour les consommateurs (ou citoyens) qui pourront réellement disposer du pouvoir d’influence qu’ils revendiquent.
Nul doute que cette évolution, comme les autres que nous avons évoquées, nous réservent encore de beaux projets pour les années à venir !
0 commentaire